Les verres ophtalmiques, les lentilles de contact ou encore la chirurgie réfractive (ou de la cataracte avec implants progressifs) sont à ce jour les seuls moyens de contrer les effets de la presbytie, un phénomène qui apparaît à partir de 45 ans et entraîne des difficultés à voir de près. Depuis plusieurs mois, les médias communiquent sur un nouveau traitement dit révolutionnaire : un collyre qui permettrait d’améliorer la vision de près et la vision intermédiaire dans le cadre de la presbytie. En quoi consiste ce nouveau traitement ? Est-ce la fin annoncée des lunettes ? Que faut-il en penser ? Éléments de réponse.
En octobre 2021, la Food and Drug Administration (FDA) a approuvé la demande d’autorisation de mise sur le marché du premier collyre visant à améliorer la vision dans le cadre de la presbytie. Celui-ci permettrait de compenser le phénomène de la presbytie. Pour rappel, la presbytie est un trouble oculaire lié à une évolution naturelle des yeux, à savoir une perte d’élasticité du cristallin et de sa capacité à désaccommoder, c’est-à-dire à s’adapter à toutes les distances d’observation, comme un autofocus. Depuis octobre 2021, aux Etats-Unis, ce nouveau traitement peut être délivré sur ordonnance pour compenser la presbytie.
Son mécanisme : fixer la pupille en myosis
Le collyre nouvellement mis sur le marché – rappelons-le aux Etats-Unis exclusivement – utilise la capacité de l’œil à réduire la taille de la pupille, et ce grâce à une solution ophtalmique à base de chlorhydrate de pilocarpine, une molécule déjà utilisée en ophtalmologie. En effet, la réduction de la taille de la pupille entraîne une vision centrale plus précise. Ainsi, d’après le fabricant, l’instillation d’une goutte chaque jour, dans chaque œil, améliorerait la vision de près et la vision intermédiaire, tout en maintenant la vision de loin. Les résultats de deux études cliniques pivots de phase III ayant évalué l’efficacité, l’innocuité et la tolérabilité de cette solution auprès de 750 patients sont à l’origine de l’approbation de mise sur le marché par la FDA.
La pilocarpine, une molécule bien connue en ophtalmologie
Le Pr Christophe Baudouin, chef du service d’ophtalmologie du CHNO des Quinze-Vingts, rappelle que la pilocarpine n’est pas une solution nouvelle : c’est un médicament qui a déjà plus d’un siècle et qui a originellement été utilisé dans le traitement du glaucome, mais qui ne l’est presque plus aujourd’hui en raison de sa très mauvaise tolérance, notamment des maux de tête et des intolérances locales.
Si les deux études mentionnent qu’aucun effet indésirable grave n’a été observé chez les participants traités par ce collyre, il est toutefois précisé que les effets secondaires les plus fréquents sont les maux de tête et les rougeurs oculaires. Des effets qui sont survenus chez plus de 5 % des participants.
Aussi, il est important de préciser ici que ce traitement ne soigne pas la presbytie, mais a une action ponctuelle et réversible sur le diamètre de la pupille. De plus, le laboratoire met en garde sur l’utilisation de ce produit en cas d’allergie à l’un des produits, en cas de conduite de nuit ou lors d’activités dites dangereuses avec faible éclairage. Il évoque également des problèmes temporaires liés à la mise au point entre vision de près et vision de loin.
En synthèse, si ce traitement peut apparaître comme une alternative aux traitements traditionnels pour contrer les effets de la presbytie, son action temporaire, ses précautions d’usage et, surtout, ses effets indésirables doivent être sérieusement pris en considération.